Articles évoquant l'histoire de la chapelle ND de Montfort sur Risle

 

1. Robert Duquesne, « La légende et l'histoire de ND de Montfort »

in Le journal de Normandie, 1909

 

Extrait du document

 

« Un seigneur de Montfort partit en terre sainte. Il laissa son épouse au logis. Quant il revint, de méchantes langues lui suggérèrent qu'il avait été trompé par sa femme. Furieux, il ordonna que celle-ci soit à l'instant précipitée dans la Risle, une pierre au cou. Justiciers d'obéir. La dame prend le Ciel à témoin de son innocence et supplie Notre Dame de faire miracle en sa faveur.

 

Ce qui advint, raconte-t-on. Car, au-dessus du fleuve, la dame, la pierre et la chaîne surnagèrent. Et c'est en ex voto à Notre Dame que, dans son repentir, le sire fit accrocher la pierre miraculeuse au pied de la statue ».

 

2. Régnier Louis, « L'église ND d'Ecouis, autrefois collégiale (l'édifice, le mobilier, la statuaire, les tombeaux, le trésor, la chapelle du Plessis, le château et les statues de Maineville, etc »

Edouard Champion, Paris, A. Lestringant, Rouen, 1913

 

Extrait du document (page 420)

 

« La fausse vue de l'église d'Ecouis par Chastillon

 

Il y a, dans l'oeuvre gravée de Claude Chastillon (1547-1616), une curieuse estampe datée de 1615, qui représente une église d'aspect singulier, composée d'un choeur avec abside polygonale et d'une partie antérieure très vaste, carrée, à plusieurs nefs d'égale hauteur, au centre de laquelle s'élève une tour octogonale. Une montagne abrite l'édifice vers l'orient. On lit en tête le titre suivant : la Magnifique et excellente chapelle de Notre Dame d'Escouis en Normandie ; mais les exemplaires de ce tirage sont rares, et, la méprise ayant été signalée, on remplaça le nom d'Ecouis par celui de Lisieux, ce qui était substituer une erreur à une autre. En réalité, Chastillon avait figuré l'église Notre Dame de Montfort sur Risle, sanctuaire d'un pèlerinage célèbre aux XIVème, XVème et XVIème siècles. Nous avons été assez heureux naguère pour identifier l'édifice et pour rendre à l'iconographie normande ce souvenir unique et insoupçonné d'un monument des plus originaux, dont on ne saurait trop regretter la perte (1).

 

(1) Cf "Dons faits par Charles VII, Louis XI et Charles VIII pour la reconstruction des églises de Notre Dame de Pontoise, Notre Dame de Montfort et Notre Dame de Cléry", dans Mémoires de la Société historique du Vexin, tome XXIX (Pontoise, 1909), pages 49-67, avec la reproduction de la gravure de Chastillon ».

 

3. Deville Etienne (1878-1944), « A propos d’une gravure de Chastillon faussement intitulée " N.D. de Lisieux" »

in Le Journal de Rouen, 31 mars 1925

 

« Quelques collectionneurs lexoviens conservent dans leurs cartons une curieuse gravure dont la légende seule justifie la présence dans leur collection. Elle porte en effet, dans sa partie supérieure : « La magnifique et excellente chapelle de Nostre Dame de Lisieux en Normandie, par C. Chastillon 1615 ». Cette gravure figure dans la Topographie françoise, de Claude Chastillon et autres, publiée en 1648 par Jean Boisseau.

 

Un simple examen de cette pièce permet tout de suite de constater une singulière méprise d’attribution. D’ailleurs, les topographes de cette époque ont été, plus d’une fois, pris en flagrant délit d’inexactitude.

 

La gravure en question n’a jamais représenté la chapelle Notre Dame de la cathédrale de Lisieux, bâtie comme on le sait, par Pierre Cauchon. Le large bâtiment carré supportant une tour octogone, n’a rien qui rappelle notre cathédrale Saint Pierre, et la chapelle même, formant abside à cette bizarre construction ne comporte que deux travers, alors que la chapelle Notre Dame de Lisieux en compte trois. L’assiette même du monument au pied d’une montagne, n’évoque nullement Lisieux.

 

Cette gravure, au point de vue iconographique, ne saurait être plus longument discutée, d’autant que certains tirages de cette planche porte comme légende « Notre Dame d’Ecouis.»

 

Là encore, l’erreur est flagrante, N. D. d’Ecouis, qui existe encore, n’a pas un seul point commun avec l’édifice d’aspect inusité dont Chastillon a reproduit l’image.

 

Dans une intéressante brochure, publiée en 1909, par le regretté Louis Régnier, se trouve la clef de l’énigme. Commentant les dons faits par les rois Charles VII, Louis XI et Charles VIII pour la reconstruction  des églises de N. D. de Pontoise, N. D. de Montfort et de N. D. de Cléry, le savant archéologue, s’appuyant sur une description de la chapelle de Montfort, publiée dans le Dictionnaire géographique et historique de Thomas Corneille, n’hésite pas à voir dans la gravure de Chastillon la reproduction de la chapelle Notre Dame de Montfort sur Risle, construite à la fin du XVème siècle par Guillaume Pontifs, l’un des meilleurs architectes de la cathédrale de Rouen, et Michel Gohier, maître de l’oeuvre de Saint Ouen de Pont Audemer, édifice démoli en 1771 et qui s’élevait immédiatement derrière le chevet de l’église paroissiale, sur un terrain où fut édifiée la mairie actuelle, en 1860.

 

Le seul souvenir de cette chapelle n’est plus conservé aujourd’hui que par une curieuse statue de la Vierge, en bois, du XIVème siècle, conservée dans l’église, statue malheureusement défigurée par une polychromie moderne.

 

Le rapprochement du texte de Thomas Corneille avec la gravure de Chastillon ne laisse subsister aucun doute : " la magnifique et excellente chapelle de Nostre Dame de Lisieux ", est en réalité la chapelle de Notre Dame de Montfort, chère à la piété de Charles VII et de Louis XI, qui fut pendant près de trois siècles, le joyau de la vallée de la Risle ».