Consentement donné par le duc au contrat de mariaqe entre Jean de Montfort et Anne de Laval

 

Copie du temps sur papier (1) (Bibliothèque de Nantes, f. Bizeul ; anc. Arch. de Rohan, Contrats de mariage, no 28)

 

Au château de Vitré, 22 janvier 1405 n.s.

 

« A tous ceux qui ces présentes lettres verront et entendront, Jean, duc de Bretagne, comte de Montfort et de Richemont, salut. Savoir faisons que, par devant nous en notre conseil, pour cette cause et d’autres, étant assemblés au château de Vitré, et aussi par devant Guillaume Declin, notre sénéchal de Rennes, et par notre cour  de Rennes, et en la présence de plusieurs nobles de notre duché et d’autres notables personnes ..., en la présence de notre très aimé oncle messire Guy de Laval, sire de Laval et de Vitré, et demoiselle Anne de Laval, notre cousine, et aussi en la présence de Raoul, sire de Montfort, chevalier, sire de Kergolay, Jean, son fils aîné, et Charles de Montfort, enfant puîné du sire de Montfort et de feue dame Jeanne de Kergolay, jadis sa femme, et de Charles de Châteaubriand parent et curateur ... est devisé, de Guillaume de Montfort l’autre fils puîné du sire de Montfort et de ... plusieurs autres nobles nommés à la fin de ces lettres, fut lue une cedulle écrite ... traité de mariage, qui par la grâce de Dieu s’accomplira entre Jean de Montfort et demoiselle Anne de Laval ; de laquelle cedulle l’effet et la teneur sont ci-après déclarés. Le sire de Laval, en préalable, se soumettant à notre juridiccion et à notre cour  de Rennes, si en tant que métier était, par nous et notre autorité entrevenant, et avec toute la solennité que droit et coutume requièrent en tel cas, a émancipé la demoiselle Anne sa fille, qui a consenti ; et le sire de Laval remit et quitta sa fille de tous loyers, qui à cause de ce lui pouvaient compter et appartenir en aucune manière. Pareillement, en préalable, Raoul, sire de Montfort et de la Roche, se soumettant ainsi que ses enfants à nos pouvoir et juridiction, et aussi nos siège et cour de Rennes, quant à chacune des choses qui s’ensuivent, émancipe, par devant nous et par devant notre sénéchal et notre cour  de Rennes, les dits Jean, Charles et Guillaume de Montfort ses enfants, les dits Jean et Charles pour eux-mêmes, et le sire de Châteaubriand pour et au nom de Guillaume, mineur de 14 ans, qui a consenti ; à chacun d’eux, leur père remit et acquitta aussi les loyers. Et, tant conjointement que séparément, par assentiment des sires de Laval et de Montfort et de leurs autres amis, nommés dans la cédulle du traité de mariage ... présents, et par les choses, élection et avis d’eux, toute solennité de droit ou de coutume ... sur ce gardée, en bonne et mûre délibération et due connaissance de cause, eu égard ... de la demoiselle et des autres enfants mineurs d’âge, et aussi à la requête de la demoiselle ... Charles, et du sire de Montfort et autres parents et amis de Guillaume, autre fils puîsné ..., en tant que chacun d’eux appartenait, Nous avont fait promettre et accomplir, tant en général qu’en particulier, chacune des choses contenues et déclarées, à savoir : à la demoiselle, de Geffroy, sire de Quintin, pour curateur, lequel a accepté cette curatelle et a juré de rechercher le profit de la demoiselle ; et donna en plège messire Jean le Veier, seigneur de la Clarté, qui le cautionna en la manière accoutumée en tel cas. Et il en est de même, pour Jean, Charles et Guillaume de Montfort, de Charles, sire de Châteaubriand, pour curateur de chacun d’eux ; lequel curateur accepta cette curatelle et jura de défendre les intérêts de Jean, Charles et Guillaume de Montfort, et leurs dommages eschiver à son pouvoir, et sur ce mit en plège messire Jean Raguenel, vicomte de Dinan, lequel le cautionna de même. En outre, eu égard aux intérêts de la demoiselle, et de Jean, Charles et Guillaume, en toute solennité et décrêt de cour  dûment interposé, Nous, en notre conseil, et aussi notre sénéchal et par notre cour  de Rennes, donnons pouvoir, aux curateurs de constituer et d’établir procureurs, en les conditions requises et manières accoutumées, pour l’accomplissement du dit traité, et par ceux des procureurs qui sont nommés et pour les choses contenues et déclarées en la dite cédulle de ce traité, cédulle dont la teneur suit.

 

Furent présents Guy, sire de Laval et de Vitré et la demoiselle Anne de Laval, sa fille, habilitée à venir seule et pour le tout à son héritage et succession universelle, la dite demoiselle émancipée par son père, et messire Geffroy, sire de Quintin, qui donne à la demoiselle connaissance du contenu des présentes, le dit sire de Quintin étant curateur de la dite demoiselle, d’une part ; et Raoul, sire de Montfort et de la Roche, Jean de Montfort, son fils aîné, et Charles, son fils puîné, et le sire de Châteaubriand, curateur de Jean et Charles et aussi de Guillaume de Montfort, leur frère dernier né ..., et ses autres enfants puînés d’âge moindre ; messire Raoul, leur père donne pouvoir de faire en leur nom ce qui suit, et aussi le curateur de Jean, Charles et Guillaume, d’autre part ; et les parties affirmèrent que, au traité du dit mariage, qui sera solennisé religieusement, entre Jean, fils aîné de messire Raoul, sire de Montfort, d’une part, et demoiselle Anne de Laval, d’autre part, elles font entre elles, de bonne foi et par ces présentes, les conventions qui suivent. Le sire de Laval, considère sa noble et ancienne lignée des barons bannerets seigneurs de Laval, qui a duré si longtemps qu’il n’est d’homme vivant ayant mémoire du contraire ; il se rappelle souvent de feu son fils Guy de Laval, seigneur de Gavre, qui trépassa naguère ; par ce décès, et comme le sire de Laval n’a aucun espoir de perpétuer sa descendance, ni les bannière, nom, cri et armes des seigneurs de Laval, qui de tout âge ont vécu loyalement envers leurs seigneurs et princes souverains, et avec le bon souvenir des sujets de leurs terres ; il ne veut pas que sa lignée, ni la bonne mémoire et vaillance de lui et de ses prédécesseurs, qui d’Anjou, du Maine et de Bretagne ont eu les honneurs du passé, ne s’éteigne ni ne soit mise en oubli ; mais il désire que son héritière naturelle et légitime, la demoiselle Anne de Laval sa fille, et que leurs lignée, nom, cri et armes de Laval se perpétuent, avec les sujets de leurs terres, à la 1ouange ... de leurs prédécesseurs, considère qu’il ne peut ce faire qu’en mariant sa fille avec une personne qui porte les nom, cri et armes de feu son fils, et ses propres bannière, cri et armes de Laval, aussitôt après sa mort ; pour ces raisons, il a pris l’avis du roi de Jérusalem et de Sicile, du duc de Bretagne, et des seigneurs de Châteaubriand, de Quintin et de Combourg ainsi que de plusieurs autres seigneurs, ses parents et amis ; de même, il promet, par les présentes, de donner en mariage la demoiselle Anne, sa fille, au dit écuyer, fils aîné de messire Raoul ; et le dit écuyer, considérant la noble lignée du sire de Laval, et le grand honneur qu’il lui fait de lui donner sa fille en mariage, voulant accomplir le désir du sire de Laval et disposer du tout à son vouloir, ainsi que ferait son propre fils naturel et légitime, de la volonté et consentement de son père, qui marie son fils, comme fils aîné et héritier principal, à la demoiselle ; et par l’avis, conseil et consentement de Charles, fils puîné du sire de Montfort, et aussi du sire de Châteaubriand, parent et curateur de Jean, Charles et Guillaume, et messire Jean Raganel, vicomte de Dinan, de monsieur Amaury de Fontenoy, de monsieur Jean d’Acigné et ses autres parents et amis ; après ce que le sire de Montfort, père et marieur de Jean, et aussi Jean et Charles, et le sire de Châteaubriand, au nom de Guillaume leur frère, et leur curator, eurent juré, ils disent, jurent et affirment pour vrai qu’ils n’ont fait ni se sont accordés entre eux, ni envers quelconques autres personnes, ou en quelque lieu ou qualité que ce soit, aucune promesse, obligation, traité ni convenance ..., chose quelconque par quoi puisse être en aucune manière préjudicié ou dérogé aux choses ... ci-après déclarées et contenues dans le présent traité ; et si aucune chose en avait été ... ou l’un d’eux ou par autres fait ou passé, au préjudice du présent traité, ils y renoncent dès maintenant, ... annulant et promettant les annuler en totalité, et s’en acquittent par les présentes, à perpétuité, sans jamais n’en pouvoir jouir en aucune manière ; promet par ces prescrites, prendre par mariage et pour femme et épouse la demoiselle Anne de Laval, dès que possible. Pour l’accomplissement de ce mariage, les parties, de leur bonne volonté, spontanément et en toute connaissance, sans fraude, contrainte ou ignorance, bien conseillées sur ces termes, assurées de leur droit, et par mûre déliberation, font par les présentes lettres, contrats, accords, promesses, conventions et obligations, et autres choses qui ensuivent.

 

I. A premièrement été traité et accordé entre les parties, que l’écuyer, et futur mari de la demoiselle, promet par les présentes de délaisser ses nom, cri et armes et celles de son père, et de les donner et transporter à Charles, son frère cadet, qui promet de les prendre ; si la demoiselle décédait sans héritier d’eux deux, Jean, son mari, porter à nouveau les armes actuelles de son père, et son frère puîné portera alors des armes différentes, en sorte que ce mariage n’aura jamais existé.

 

II. L’écuyer promet de porter, dès le présent mariage contracté, les nom, cri et armes de Laval, les propres nom et surnom de feu le sire de Gavre, c’est-à-dire Guy de Laval, sire de Gavre, et les cri, timbre et armes que portait le feu sire de Gavre, fils du sire de Laval. Et ainsi il se fera nommer en sceaux et toutes manières descriptives, et après le décès du sire de Laval, les propres nom et surnom, c’est-à-dire Guy, sire de Laval et de Vitré, et les cri et pleines armes de Laval et leur timbre, ainsi que les porte le sire de Laval, sans rien y ajouter ni ôter, tant en bannières, écussons, panneaux, tunique, heaume, sceaux, signets, lettres, écritures, contrats, procès, actes juridiques, couvertures de chevaux, et il promet de les porter en bataille, tournois, en tous faits d’armes et tous autres lieux ou circonstances où un noble doit user de ses armes ; et en les lettres qu’il fera, pour quoi que ce soit, il fera mettre : Guy, sires de Laval et de Vitré.

 

III. De même, les enfants qui naîtront du mariage seront tenus de les porter, ainsi que les descendants en ligne mâle, c’est-à-dire celui qui reprendra l’aînesse, les pleines armes, et les puînés à différence, selon la coutume en tel cas. Et ces enfants seront tenus de le jurer aussitôt qu’ils seront âgés de 14 ans.

 

IV. Les futurs mariés seront tenus de faire jurer, devant le juge ordinaire du Maine, en présence de 2 tabellions et 2 ou 3 anciens amis du lignage de Laval que l’on pourra trouver, à leurs enfants, et en particulier à celui qui reprendra l’aînesse, aussitôt qu’ils seront âgés de 14 ans, ou au moins de faire tout leur pouvoir envers leurs enfants qu’ils le jureront ainsi. Au cas où les mariés n’auraient pas d’enfant mâle, et que leur succession revienne à une fille, il promettent de marier cette fille à un homme qui porte les nom, cri et armes de Laval, de semblables manières, sous les peines contenues dans ce traité.

 

V. Pour accomplir toutes ces conditions sans infraction, l’écuyer convient que, s’il faisait le contraire, de quelque manière que ce soit, il soit tenu pour parjure et privé de tout honneur et noblesse, et que ceci serait publié en tous lieux, à la requête de chacun de la lignée de Laval jusqu’au 7ème degré, ou d’autres proches du lignage de la demoiselle qui voudront requérir celà.

 

VI. De même, les père et frère du dit écuyer, Charles son frère et leur curateur, ainsi que la demoiselle, chacun pour ce qui le concerne, promettent d’accomplir ces engagements, sans jamais faire le contraire, et que, si l’écuyer et les enfants issus de ce mariage ou de leur descendance en ligne mâle, s’efforçaient d’enfreindre ces promesses et de délaisser les nom, cri et armes de Laval, et de porter celles que portaient l’écuyer ou son père ou ses ancêtres, ou d’autres quelqu’elles puissent être, alors l’écuyer accepte que lui, pour son compte, et celui de ses héritiers qui fera défaut, encourre une pénalité de 100 000 livres parisis, à devoir moitié au roi et moitié à messire Guy de Laval, seigneur de Mont Jean, s’il est en vie, ou à son héritier, s’ils le veulent et peuvent poursuivre, ou à d’autres du lignage de Laval jusqu’au 7ème degré, et qui voudront porter les nom, cri et armes de Laval ; il jure et gage de payer ces pénalités, et veut en être contraint et exécuté aussitôt par commise.

 

VII. Avec ce qui précède, l’écuyer, au cas où il enfreindrait ses promesses, donne et transporte à perpétuité le tiers de ses terres actuelles, et de celles qu’il possèdera tant par succession parentale qu’autrement, en quelque lieu que ce soit, à messire Guy de Laval, s’il est en vie, ou à son héritier mâle s’il le veut et peut poursuivre, ou à d’autres du lignage de Laval jusqu’au 7ème degré, qui prendront les nom, cri et armes de Laval à défaut du dit écuyer ou des siens.

 

VIII. Semblable pénalité sera encourue par les enfants mâles descendant de ce mariage, et en particulier par celui qui devra succéder en la terre de Laval, s’ils s’efforçaient de porter d’autres nom, cri et armes que celles de Laval.

 

IX. Au cas où l’écuyer ou la descendance de ce mariage violerait ces promesses, le sire de Laval, du consentement de l’écuyer et de la demoiselle, donne et transporte à perpétuité à messire Guy de Laval [?], seigneur de Mont Jean, s’il est en vie, ou à son héritier mâle, s’ils le veulent et peuvent poursuivre, ou à d’autres plus proches de la lignée de Laval ou d’autre lignée, à son prochain parent, qui prendra et portera les nom, cri et armes de Laval à défaut du dit écuyer et des siens, le tiers de ses terres, en quelque lieu que ce soit.

 

X. A défaut de l’écuyer et des siens de porter les nom, cri et armes de Laval, et aussi à défaut de messire Guy de Laval, seigneur de Mont Jean ou de son héritier mâle, ou aussi de la lignée de ceux de Laval, le sire de Laval, du consentement de l’écuyer et de la demoiselle, donne alors le dit tiers de ses terres au plus proche de lui d’autre côté et lignée que de la lignée de Laval, qui voudra reprendre les nom, cri et armes de Laval, sauf le viager et l’usufruit de la dite terre de la demoiselle, sa vie durant, au cas où l’écuyer ou d’autres descendants de ce mariage ne portaient les nom, cri et armes de Laval, et qu’elle aurait fait en sorte qu’ils les portent de la manière convenue ci-dessus. Et si messire Guy ou ses héritiers, ou les autres de la lignée de Laval ou d’une autre lignée proche du sire de Laval, ou les autres principaux héritiers descendant d’eux, violeraient les présents accords et ne voudraient prendre et poursuivre les donations précédentes, ni relever ou subtituer les nom et armes de Laval, comme convenu, pour quelque raison que ce soit, alors le sire de Laval, du consentement de l’écuyer et de la demoiselle, chacun pour sa part, donne au roi de Sicile, comme duc d’Anjou et comte du Maine, et au duc de Bretagne, le tiers des héritages que le sire de Laval possède dans leurs seigneuries, sans ce que jamais lui ni ses héritiers ne puissent en jouir en propriété. Il n’est pas dans l’intention du sire de Laval, en faisant la dite donation, au cas où durant sa vie, le défaut d’accomplir les dites choses adviendraient, de porter le nom et les armes, comme il est dit, de se démunir des propriété, usufruit ou possession de ses héritages, aucunement durant sa vie, ainsi que nonobstant il en demeure seigneur et propriétaire, et qu’il en puisse faire et ordonner comme bon lui semblera, sauf qu’il ne puisse quiter, remettre ni annuler les grés, promesses, serments, etc, de porter les nom et armes de Laval, comme convenu dans les présentes.

 

XI. A aussi été convenu que l’écuyer soit reçu à foi et hommage par les ducs de Bretagne, d’Anjou et comte du Maine, tant de sa terre propre que de celle de la demoiselle, qu’il promet aux dits seigneurs, ou solemnellement devant le sénéchal de Rennes, ou devant le juge ordinaire d’Anjou et du Maine, s’il voulait recevoir, et l’offre faite, si reçue ne sont, pourra jouir de leur héritage comme si cette condition n’eût pas existé. De même feront ses successeurs descendant de ce mariage en ligne mâle, qui portent les nom, cri et armes de Laval, et aussi ceux du lignage qui, à leur défaut y viendront. Et tant qu’ils refuseront de faire, les dits seigneurs ne seront pas tenus de les recevoir à foi et hommage, mais pourront jouir et exploiter les dites terres, et en recueillir les fruits jusqu’à ce qu’ils aient fait le dit serment comme convenu.

 

XII. En outre, a été convenu, pour l’accomplissement de ce mariage, que le père de l’écuyer le marie avec la demoiselle, comme son fils aîné, et principal héritier de la terre tant du dit père que de la mère, avec le consentement de Charles, son frère, et du sire de Châteaubriand, leur curateur, en leur nom et aussi comme curateur de Guillaume leur frère, et il affirme qu’il n’a pas fait dans le passé, et promet qu’il ne fera pas à l’avenir, de chose telle que l’écuyer, fils aîné héritier principal de ses parents, ne reçoive pas tout leur héritage, conformément aux coutumes des pays.

 

XIII. Charles et les curateurs, pour eux et au nom de Guillaume, ont aussi donné leur consentement à ces termes, sans ce que jamais les enfants puînés des père, frères et soeurs, nés ou à naître, ne puissent rien demander des biens des père et mère de l’écuyer, pour motif de succession ou autres, sauf le droit de succession que la coutume du pays leur donne, et pour lequel leur père et frère aîné leur donnent, par les présentes, les terres et seigneuries qui suivent : le château de Frinodour [ancien château au confluent du Leff et du Trieu, Côtes du Nord, sur la commune de Quemper-Guézenec], la châtellenie de Quenpergueheneuc et Pontreu, la châtellenie de Coatannay [Côtes du Nord, commune de Louargat] et de St Michel en Grève, Kermoroc’h, la châtellenie du Vieux Marché, la châtellenie de Camors, Plouigner, Kervignac et Plouhinec [?], le château de Coët-Bihan [?] [ancien château sur la commune de Questembert, Morbihan] et la terre de Moréac, et ce qu’ils ont en la paroisse de Sené [canton de Vannes] et à Vannes, en toutes dépendances, comme ces terres ont été accoutumées d’être gouvernées, à en jouir après le décès de leur père, qui valent autant ou plus que la portion que leur peut compter les biens et héritage parentaux, selon la coutume du pays ; Charles de Montfort, et son frère Guillaume, consentent ce qui précède sans jamais réclamer autre chose, et par serment renoncent à tout recours.

 

XIV. Au cas où une donation, vente ou autre aliénation aurait été faite dans le passé, ou serait faite à l’avenir, par le père ou l’écuyer son fils aîné, de leurs héritages présents ou à venir, au profit des puînés et au préjudice des promesses et autres choses susdites, de quelque manière que ce soit, directement ou obliquement, soit à autres personnes ou en autre nom au profit des dits enfants ou autrement, en diminuant ou empêchant d’unc quelconque manière le droit de la succession de son fils aîné, les dits père et enfants, autorisés par leur curateur, et le dit curateur pour eux et au nom de Guillaume, dès lors y renoncent et veulent qu’elles soient nulles, sans jamais n’en rien avoir ni demander, et ils y renoncent par serment.

 

XV. Si le père ou l’écuyer, son fils aîné, faisaient une quelconque vente, obligation ou aliénation de meuble ou d’héritage, ou toute autre action au préjudice de ce qui est dit, ils veulent que tout soit nul et de nul effet, et que tout ce qui serait vendu, aliéné ou transporté de la sorte revienne à la demoiselle, ou à celui du lignage de Laval qui poursuivra ; dès maintenant, le père et l’écuyer son fils, au cas où ils feraient aliénation, don ou transport d’héritage, le donnent et transportent à la demoiselle, sans qu’elle puisse y renoncer ni consentir au contraire ; si elle y renonçait ou consentirait au contraire, ces choses ainsi aliénées appartiendraient dès lors à messire Guy de Laval, seigneur de Mont Jean, s’il est en vie, ou à son héritier mâle, s’ils le veulent et peuvent poursuivre, ou à d’autres du lignage de Laval jusqu’au 7ème degré qui se poursuivra, et qui voudra prendre et porter les nom, cri et armes de Laval, et les en font, dès maintenant, les vrais seigneurs, et ils s’engagent à tenir et posséder en leur nom sans jamais rien y demander ; et ils veulent ainsi que le tiers de leur héritage soit donné à messire Guy de Laval, seigneur de Mont Jean, s’il est en vie, ou à son héritier mâle, ou à d’autres de la lignée de Laval, au dit cas.

 

XVI. Et pour plus grande sûreté, si, de quelque manière que ce fut, le père ou son fils faisaient vente, aliénation ou obligation de leurs héritages aux profit et accroissement des autres enfants du père, nés ou à naître, ou à d’autres, au préjudice de ce qui est dit, ou s’ils cherchaient à ce que la demoiselle vende ou aliène une partie de son héritage, ils veulent que tout soit nul, et en outre être contraints à tout restituer et dédommager, et leur rendre et donner autant de leur propre terre ; dès à présent ils le donnent et s’en démettent, et conviennent de tenir et posséder ces biens au nom de la demoiselle et de ceux de la lignée de Laval, comme dit ci-dessus, sans que la demoiselle ou les autres de la lignée de Laval puissent consentir au contraire.

 

XVII. En outre, si l’écuyer ou son héritier mâle, ou tous autres héritiers mâles de leur descendance, ou seulement l’un d’eux, défaillaient de porter les nom et armes de Laval, comme énoncé, ou si le père et l’écuyer son fils avaient fait dans le passé ou faisaient faire, par le consentement du sire de Laval ou de la demoiselle, ou autrement, à l’avenir, une chose au préjudice des préalables et conventions précédentes, de quelque manière que ce soit, alors ils donnent et transportent à messire Guy de Laval ou à ses héritiers mâles, ou tous autres de la lignée de Laval, le tiers de leur héritage et tout ce qu’ils peuvent donner de droit et de coutume. Et si messire Guy, ou ses héritiers, ou d’autres de la lignée de Laval, ne voulaient prendre ou poursuivre les donations ci-dessus par don, crainte, faveur ou autre quelconque corruption ou trop notable négligence, dans ces cas, le père et l’écuyer donnent aux ducs de Bretagne et de Normandie et au comte d’Evreux le tiers de l’héritage qu’ils tiennent d’eux, et tout ce qu’ils peuvent donner de droit et de coutume, ainsi que les dites donations, les dits donataires, ni aucun d’eux ne pourront remettre ni renoncer par transaction, composition, vente, donation, etc.

 

XVIII. Quant au douaire de la demoiselle, ou à la place de celui-ci, les parties se sont accordées pour que le père et l’écuyer, son fils Charles et le curateur, pour eux et au nom de Guillaume, donnent et assignent par les présentes à la demoiselle ce qui s’ensuit, savoir : toutes les terres qui appartiennent au chevalier en France et en Normandie, la baronnie de Gaël, sise en Bretagne, ainsi qu’elle se comporte, avec le château de Comper et les paroisses suivantes, à savoir celles de Gaël, Mauron, Concouret, Illefau, St Brieuc de Mauron, St Léry [Morbiban, commune de Mauron], Plumaugat, St Jean de l’Isle, et généralement toutes les dépendances de la baronnie de Gaël en quelconques paroisses, sauf les forêts de Brécelien ; à jouir des dites pièces pour douaire, aussitôt après le décès de l’écuyer, sire de Guergorlay, même du vivant du sire de Montfort ; en outre, il donne sur la terre de Lohéac, jusqu’à la somme de 1 200 livres de terre, à en jouir après la mort du sire de Montfort, pour en jouir sa vie durant comme douaire, malgré la coutume selon laquelle « femme qui est héritière principale ne doit avoir douaire » ; ce à quoi le père et son fils aîné, et le frère de ce dernier Charles, ainsi que le curateur pour eux et au nom de Guillaume de Montfort, renoncent, en supplient le roi, le duc de Bretagne ou d’autres seigneurs, chacun pour sa part, d’approuver et de confirmer ces termes en tant que de besoin ; si elle ne peut tenir ces biens au titre d’un douaire, ils veulent qu’elle les tienne au titre d’un don de noces ou d’une manière mieux appropriée. Et pour ce douaire ou don de noces, le père et l’écuyer lui assignent dès maintenant les lieux sus-dits, à savoir les dites terres de France et de Normandie, la baronnie de Gaël et le château de Comper, les paroisses susnommées et la terre de Lohéac, jusque à 1 200 livres de terre, outre les autres terres susdites. Charles et le curateur, pour lui et au nom de Guillaume, ont donné leur assentiment à ces termes.

 

XIX. Outre celà, pour pourvoir à l’état et au gouvernement du vivre des dits écuyer et demoiselle, a été convenu entre les parties que l’écuyer jouira dès à présent de tout les biens immeubles et héritages qui peuvent appartenir à ses frères, au titre de la succession de sa défunte mère, et consent expressément par ces présentes, messire Raoul, son père, et Charles, son frère, et son curateur au nom de Charles et de Guillaume et du consentement de leur père, malgré la coutume de pays, il dût jouir de la dite terre ou d’une partie, tant que veuf il cherchera à se marier. Et en outre, messire Raoul, le père, donne par ces présentes, à Jean, son fils, en avance d’héritage, la terre de Camzillon [Loire Inférieure, canton de Guérande, commune de Mesquer] et la terre de St Jean sur Coaynon, et toutes leurs dépendances, dont il lui transporte les droits de propriété, seigneurie, etc, avec les dons, noms et actions réelles et personnelles, etc ; et il s’en est dessaisi, voulant que son fils en soit reçu en la foi et hommage, possession et saisine par celui ou ceux à qui il appartiendra, constitua ses procureurs généraux et certains messagers particuliers, sans appel, Pierres Dolier, André Rabaut, maître Thibaud Quenoar, auxquels il donne plein pouvoir de ce faire et tout ce qui en tel cas est accoutumé de faire, à tout ce que dessus est dit reconnaitre et accomplir, pourvu que si Jean décédait avant le sire de Montfort, les terres de Canzillon et de St Jean de Coaynon retourneront au sire de Montfort, sauf à revenir aux enfants de Jean après la mort du sire.

 

XX. Guillaume, dernier né des fils du sire de Montfort, étant mineur de 14 ans, pour plus grande promission et poursuite du traitié, il est convenu entre le sire de Laval d’une part, et le sire de Montfort de l’autre, que le sire de Montfort fera faire consentir et ratifier par Guillaume, aux prochains plaids généraux de la cour  de Rennes qui seront tenus après ses 14 ans accomplis, ou à d’autres plaids de la dite cour  pendant sa 15ème année, accomplir toutes les choses contenues dans ce traité, qu’elles soient faites en son nom par son curateur ou autrement, pour ce qui le concerne ; pour ce, il devra comparaître en personne en pleins plaids à la cour  de Rennes, suffisamment habilité tant par émancipation que par curateur. Pour ce faire, le sire de Montfort promet et est tenu de faire diligence, par la foi et serment de son corps, sous peine d’une amende de 10 000 livres tournois, à verser moitié au duc de Bretagne et moitié au sire et à la dame de Laval, sa compagne ; laquelle somme le sire de Montfort a promis de leur payer à leur requête en cas de défaut d’accomplissement de ce qui est convenu.

 

XXI. Les dites parties veulent et consentent, sous les autorités et consentements susdits, que les présents contrats, accords, promesses, donations, transports, obligations valent, tiennent et aient leur plein effet, malgré les us ou coutumes du pays, ou toute chose contraire, à quoi ils renoncent par les présentes ; et si elles ne valent en tout, qu’elles valent tant comme la raison ou les coutumes des pays le comportent.

 

XXII. Les dites parties ont promis et juré ne pas obtenir de dispense de serment, ou autres, contraires à ce qui est convenu, ni en user s’il en était obtenu par quelque personne, ou de quelque manière que ce soit.

 

XXIII. En outre, le père et son fils, ainsi que le curateur, pour eux et au nom de Guillaume de Montfort, promettent par les présentes de faire, confirmer et approuver les choses susdites ; et ils consentent qu’elles soient confirmées et approuvées, en leur présence ou absence, par le roi et par le duc de Bretagne et les seigneurs des pays où les terres des différentes parties sont assises, et à qui ce peut appartenir, et d’obtenir sur ce, lettres par lesquelles le roi et les dits princes confirmeront et approuveront toutes les choses susdites et le contenu des présentes. Et ils dispenseront des coutumes des pays qui seront contraires aux choses susdites, ou à l’une d’elles, ou par lesquelles elles ne pourraient avoir d’effet ; et en feront toute leur diligence et devoir avant que l’année prochaine ne soit écoulée ; et les dites lettres ainsi obtenues seront apportées au seigneur et à la dame de Laval pendant ce même temps.

 

XXIV. Les dites parties ont en outre convenu que toutes les choses sus-énoncées soient soumises par eux au parlement du roi, et elles consentent, par ces présentes, que ces choses soient accomplies sans enfreindre, condamnées par arrêt ou jugement de la dite cour de parlement. Et pour ce faire, les parties constituent, par les présentes, leurs procureurs généraux et certains messagers particuliers, sans appel, maître Herbert Camus, Gervese Ysembart, Benoist Pidalec, maître Guy Raoul, maître Thibaud Quenoir, Pierres Dolier, André Rabaut, Jean Dumas, Thomas Berthier, auxquels ils donnent plein pouvoir ou mandement particulier de ce faire, et tout ce qui en tel cas sera nécessaire de faire.

 

XXV. De ces mêmes choses les parties ont convenu de lettres pareilles de cour d’église, par la cour de l’évêque de Rennes et de son official, à laquelle juridicton ils soumettent, par laquelle s’obligent à accomplir les choses susdites, sous peine d’excomunication ou autres ; les parties pourront jouir de ces lettres avec ces présentes, sans que l’exécution d’une de ces lettres ne soit empêchée ou retardée par l’exécution des autres.

 

Les parties, chacune pour ce qui la concerne, promettent par leurs serments, de tenir fermes et stables, sans appel, ce traité et ces obligations, peines, et autres conventions sus-énoncées, et de les accomplir sans aller à leur encontre, par erreur, ignorance, minorité d’âge ni autrement, par quelque voie que ce soit ; les parties promettent, chacune pour ce qui la concerne, de rendre et apporter tous coûts, dommages, salaires, journées, interêts et dépens encourus en raison des choses sus dites ; s’obligeant à accomplir toutes les choses susdites, les parties, sous les autorités et consentements énoncés ci-dessus, eux et leurs biens, leurs héritiers et les biens de ceux-ci, meubles et immeubles, présents et à venir, et de même le père et son fils, tous leurs biens et ceux de leurs héritiers, et chacun d’eux pour le tout ; et Charles de Montfort, et le curateur en son nom et celui de Guillaume, tous les biens des puînés et de leurs héritiers, et chacun pour le tout, qu’ils submettent pour ce faire à justice, vendre par nous et tous autres justiciers, sous quelque juridiction que ce soit et pourront se trouver ; et les parties renoncent, chacune pour ce qui la concerne, par leurs serments, à toutes exceptions, fraude, erreur, ignorance, grâces, franchises, libertés, dispenses, etc quelconques, émanant de pape, de roi, de prince ou de prélat, données ou à donner, qui soient contraires ou préjudiciables à cette convention, à toute aide de droit écrit ou non écrit, à tous usages, coutumes de lieux et de pays, sans cause ou cause indue, à toute lésion, à convention de lieu ou de juge, à bénéfice de division, relèvement du terme, restitution, à déception d’autre moitié de juste prix, et à ce qu’ils puissent dire ou proposer à l’avenir.

 

De même, la demoiselle au bénéfice du sene consule (sic) Velleyen, à l’épître de divi Adrian, et à tous autres droits, faits et introduits en la faveur des femmes.

 

Et généralement les dites parties renoncent à toutes autres choses, tant de fait comme de droit, d’us ou de coutume, qui pourraient aller à l’encontre de ces lettres, et elles renoncent aussi à jamais, à demander ou obtenir, par eux-mêmes ni par d’autres, ce qui irait, dans le futur, à l’encontre des choses susdites. De ces choses seront faites plusieurs lettres, en nombre suffisant pour les parties et ceux à qui elles voudront. Auquelles choses ci-dessus écrites, tenir, garder, faire, accomplir entièrement, sans jamais venir à leur encontre, Nous, en notre conseil, et aussi notre sénéchal de Rennes et par notre cour  de Rennes, condempnons, par ces présentes, les dites parties comme dit ci-dessus, sauf à nous reserver nos droits, souveraineté, libertés, seigneuries et noblesses, selon les coutumes et usages de notre pays, et sans notre préjudice aucunement.

 

Présents aux choses susdites, révérends pères en Dieu Adam, évêque du Mans, Hus, évêque de Vannes, les seigneurs de Montauban et de Combour, Pierres de Rochefort, le sire du Plessis-Bertrand, le seigneur de Oudon, le sire de Molac, monsieur Armel de Châteaugiron, messire Amaury de Fontenay, messire Jean d’Acigné, monsieur Juhes d’Avaugour, monsieur Jean de la Chapelle, monsieur Georges Chesnel, monsieur Guillaume de Mat(h)efelon, monsieur Jean de St Didier, monsieur Guillaume d’Ebrée, messire Ambroise de la Foillée [Feuillée ?], monsieur Guillaume d’Oranges, messire Jean l’Enfant, monsieur Jean de St Gille, monsieur Jean de Langueoez, monsieur Mahé Lévêque, monsieur Bertrand de Texue [Texier ?], monsieur Olivier Arrel et plusieurs autres chevaliers, dames, damoisselles, écuyers et autres gens nobles.

 

En témoignage des choses dessus dites, Nous avons commandé d’apposer à ces présentes le sceau de notre chancellerie, avec les sceaux des contrats de notre cour  de Rennes ; auxquels ont aussi apposé leurs sceaux, le sire de Laval et de Vitré, pour lui et sa fille et pour le sire de Quintin, et messire Jean le Vaier, à leur requête, et chacun pour sa partie, le sire de Montfort pour lui, et le sire de Châteaubriand tant pour lui que pour Jean, Charles et Guillaume de Montfort, et pour monsieur Jean Raguenel, à la requête de Jean, Charles et Raguenel, et chacun pour sa partie, pour mettre fermeté aux choses dessus dites Ce fut fait et donné au château de Vitré, le XXIIème jour du mois de janvier, l’an 1404.

 

Signé Raoulet Guinot passe. P. de Romelin passe. »

 

Notes

 

(1) Copie en forme de rouleau de 2,85 m sur 0,30 m ; la partie supérieure est un peu endommagée. Par suite, les débuts de l’acte présentent quelques lacunes. Duchesne (Hist. généaloqique de la maison de Montmorency et de Laval, 1624, p. 573-575, a publié à peu près textuellement quelques passages du contrat proprement dit, inclus dans les lettres de Jean V

(2) Le titre d’écuyer se rapporte à Jean de Montfort, le futur, fils ainé de Raoul de Montfort, lequel est qualifié de chevalier.