Montfort

(16 / 04 / 2015)

 

1. Localisation (Pays de la Loire, 49 - Maine et Loire)

 

Montfort (D 960) (135 habitants, altitude 91 m) est une commune située à l'Est de Doué la Fontaine, à une quinzaine de km au Sud Ouest de Saumur.

 

2. Description

 

2.1. Le village

 

Malgré son nom, l'aspect actuel de Montfort ne suggère guère que le village ait été jadis fortifié. Les raisons de cette dénomination peuvent tenir à l'existence passée (IXème ou Xème) d'une ancienne fortification en bois aujourd’hui disparue (château « de terre »), ou encore à la possibilité d'un transfert de patronyme.

 

* église de Montfort (XIXème) (photographie des années 1980). Cette église contient un retable (XVIIIème) ;

 

* demeures de Montfort et alentours (dessins d’après photographies anciennes) : A, B, C.

 

Une partie du village aggloméré relève de Cizay la Madeleine (une centaine d'habitants). Sur la commune se trouve un vignoble appelé « domaine de Montfort » (12 ha) (comparer au domaine de Montfort à 39 - Arbois ou à celui de Montfort à 37 - Chançay), ainsi qu’un tailleur de pierre (tuffeau). Le village aggloméré renferme de nombreuses caves, anciennement dénommées « caves demeurantes » (c'est-à-dire à usage d'habitation) : en 1870, la moitié de la population occupait cet habitat troglodyte. Ces maisons troglodytiques on longtemps été négligées, mais diverses initiatives (1996) visent à restaurer ce patrimoine architectural. D'autres maisons troglodytes se trouvent à Cizay la Madeleine.

 

Comme Montlouet, le village est construit sur du calcaire turonien (crétacé tendre, du nom de la ville de Tours) : cette couche géologique est commune dans la région allant de Blois à Gennes. La plupart des bâtiments actuels de Montfort sont des réemplois d'édifices ruinés à diverses époques, ce qui explique la relative homogénéité des matériaux. Les moellons, en petit appareil, sont surtout en calcaire blanc. Certaines pierres très dures, dites « cassou », sont aussi assez communes dans les environs.

 

2.2. Autres édifices

 

* une ferme appelée « la Fortière », située place de l'Eglise, est un édifice public (propriété de la commune) : elle daterait du XVIème ou du XVIIème. Ses dépendances ont été détruites (XXème) pour agrandir la place de l’église. Le gros oeuvre est en moellons de tuffeau, partiellement enduit ; la couverture est en ardoise (toit à longs pans, pignon découvert, pignon couvert) ; elle possède un étage en rez-de-chaussée et un étage en surcroît.

 

* une maison dite « de maître Bèze » (propriété privée), située rue de la Mairie, daterait du XVIème ou du XVIIème. Elle a été remaniée au XVIIIème. Le gros oeuvre est en moellons de calcaire enduit, la couverture en ardoise (toit à longs pans, avec croupe, pignon couvert et noue) ; elle possède un étage carré et un étage de comble.

 

2.3. Le château d'Epinats (XVIIIème) (propriété privée), en bordure du village, mais aujourd’hui situé sur la commune voisine de Cizay la Madeleine, est entouré d'une enceinte dont les murs sont assez hauts, mais ne semblent pas avoir joué un rôle militaire de défense.

 

* plan de situation schématique ;

 

* vue d'ensemble du château d'Epinats.

 

3. Histoire

 

Le site est mentionné très tôt (IXème). Son nom le plus ancien était Spinacra (844) (du latin « spina » : épine), puis il devint Spinacium (897) (toponymes qui sont peut-être à l'origine du nom du château d'Espinats). Enfin (circa 1162-1177), le lieu prit son nom actuel, déduit du latin Monsfortis.

 

Le cartulaire noir de la cathédrale d’Angers (Urseau) cite, à certaines reprises, les noms de Montfort et d’Epinats : extraits du cartulaire. Il en est de même pour le dictionnaire de C. Port.

 

Aucune trace de vestiges fortifiés n'a cependant été mise en évidence jusqu'ici. Il existait un village situé entre l'actuelle route nationale et Piémont (ou Plémont) : on ignore pourquoi  (épidémie ou guerre) ses habitants se sont déplacés (XVème) vers un lieu appelé Epinatz, ni pourquoi ce lieu s’est ensuite appelé Montfort.

 

La butte située vers Piémont (et où furent trouvées des tuiles gallo-romaines et des traces d'occupation antérieure) aurait été fortifiée au XIIème (Célestin Port). Elle devint alors le centre d'un peuplement qui prit le nom de Montfort, devenu aussi celui de la paroisse, tandis que le château seigneurial d'alors, conservait curieusement le nom d'Epinatz. Pendant la guerre de Cent Ans, le Sud de Saumur fut souvent envahi : les souterrains (habitats troglodytiques) du Montfort actuel étaient peut-être jugés plus sûrs que les hauteurs. Les quelques notables occupant des constructions en surface les avaient entourées de murs élevés et épais.

 

Sous l'Ancien Régime, la région dépendait des seigneurs d'Epinatz, maison qui s'éteignit pendant la Révolution à Angers (janvier-février 1794), ainsi que leurs arrières-neveux, les Delavau. Une famille de Saillant posséda (circa 1750) les 3 châteaux actuels de la Mouche, d'Epinatz et de Montfort, qui furent construits à cette époque (style XVIIIème).

 

4. Héraldique

 

4.1. Dans Jougla de Morena, sont citées :

 

4.1. Une famille de Courcel (Lorraine) : 11533, « d'azur à la bande d'argent accompagnée de 3 besans d'or, posés 2 en chef et 1 en pointe ».

 

4.2. Une famille Chodron de Courcel : 9200 (Toul, baron héréditaire en 1867), « de gueules à 3 chaudrons d'or, posés 2 et 1 ».

 

4.2. Par ailleurs, Port mentionne (archives départementales avant 1790) l’existence d’une famille de Lespinay et d’une famille de Lespine. Il cite aussi (Livre de Guillaume le Maire) un Gaufridus d’Espinou (ainsi que sa femme Jeanne) dans une charte (11 décembre 1312) relative à un « Hommagium Ermellandum de Tercia Curia », hommage d’Ermelande (?) de Tessecourt (château sur la commune de Chanteussé, aujourd’hui Champteussé sur Baconne) pour le fief de ND du Pré, qu’elle détient de l’évêque d’Angers. Mais Champteussé se trouve à quelques 30 km au Nord Ouest d’Angers, tandis que Doué la Fontaine en est à environ 50 km au Sud Est.

 

8. Toponymie

 

8.1. Urseau (cartulaire noir) cite une famille de Montfort (Odon ou Eudes, Audebert, Réginald ou Raynaud), mais ses possessions ne sont pas indiquées dans le cartulaire.

 

8.2. Maitre ne décrit aucun Montfort ou Espinats (ou équivalents) dans son dictionnaire, bien que de nombreux toponymes évoquant l'épine (Epinay, etc) y soient indiqués.

 

Il cite seulement des lieux portant des noms de consonnance voisine, comme Montflours, qui proviendrait de : Matheus de Monfolor (1206, archives des hospices de Château-Gontier), ou In parrochia capelle de Montefolor (1242, abbaye de Fontaine Daniel), puis Montfleur et Montfouleur (1589, registres paroissiaux). Il cite aussi le nom de Montfolon, sur la commune de St Quentin.

 

8.3. Par contre, Port désigne le toponyme d’Epinats (« épine ») et semble l’assimiler à Montfort (cf son dictionnaire historique, tome 2). Il cite, par ailleurs, divers toponymes phonétiquement semblables à Montfort : Montfleur ou Montfouleur (qui était un fief) au Tremblay ; Mon Fiez ou Monfier, Monfief et Monfiet (à Doué), Montfort alias Espinars (assimilation tardive d’un pouillé de 1783)

 

8.4. Dans le passé, des confusions entre noms (toponymes ou antroponymes) semblent à l’origine des dénominations telles qu’elles sont fixées actuellement, d’autant que divers toponymes sont phonétiquement « proches » de celui de Montfort : Montflours (Matheus de Monfolor, 1206), capelle de Montefolor (1242), Montfleur et Montfouleur (1589), Montfolon (commune de St Quentin), ainsi que .

 

Dauzat explique l’antroponyme Epine soit comme nom d’une propriété contenant (ou entourée par) des arbres épineux, soit comme ancien fief.

 

Montfort résulterait donc de la subdivision d’un domaine dépendant d’une villa « royale » carolingienne et y a, peut-être alors joué un rôle de défense. Le terme d’épine pourrait (localement) équivaloir à ceux de palissade ou palisse : ce terme était utilisé pour les constructions à valeur défensive (turris romaines ou château médiévaux en bois). D’où une période d’assimilation ou d’équivalence entre Montfort et Espinats, aujourd’hui distingués toponymiquement. Le patois local a aussi pu interférer avec ces appellations, en déformant certains noms pour les rapprocher d’autres phonétiquement voisins.

 

Les hypothèses précédentes nécessiteraient donc des analyses plus approfondies.

 

9. Bibliographie

 

Bellard Jean, « L'originalité de Montfort », notice rédigée en 1995

 

Chéruel Adolphe (1809-1891), « Dictionnaire historique des institutions, mœurs et coutumes de la France » (2 parties), Librairie Hachette, Paris, 1899

 

Guérard Benjamin Edme Charles, « Cartulaire de l’abbaye de St Père de Chartres » (2 tomes), Imprimerie de Chapelet, Paris, 1811, 1840

 

Lebrun Francois, « Paroisses et communes de France. 49, Maine et Loire » (démographie historique), EHESS, Paris, 1974

 

Maître Léon (1840 - 1926), « Dictionnaire topographique du département de la Mayenne, comprenant les noms de lieu anciens et modernes », Imprimerie nationale, Paris, 1878

Léon Maître (archiviste de Loire-Inférieure de 1871 à 1910)

 

Port Célestin (1828-1901), « Inventaire analytique des archives anciennes de la mairie d’Angers, suivi de tables et de documents inédits , publié sous les auspices du conseil municipal », J. Dumoulin, Paris, 1861

 

Port Célestin (1828-1901), « Inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790. Maine et Loire, archives civiles, série E », A. Durand, Paris, 1863

 

Célestin Port (1828-1901), « Le livre de Guillaume le Maire (12..-1314) », « Liber Guillelmi Majoris », Imprimerie Nationale, Paris, 1874

 

Port Célestin (1828-1901), « Dictionnaire historique, géographique et biographique de Maine et Loire », 3 tomes, 1874-1878

 

Torre Michel de la -, « Villes et villages de France (49 - Maine et Loire)  », Editions Deslogis-Delacoste, 1991

 

Urseau Charles (chanoine -), « Cartulaire noir de la cathédrale St Maurice d'Angers », Alphonse Picard & fils, Paris, Librairie Germain & G. Grassin, Angers, 1908

 

Sites Internet

 

http://www.cc-douelafontaine.com/?p=commune&id_com=8 (communauté de communes de Doué la Fontaine)