Comité d'histoire vosgienne - Documents rares ou inédits de l'histoire des Vosges

(tome 08)

 

Mars 1280. Lettre d'hommage de Perrin de Louvenci pour Domjulien et Girovillers

Original : Trésor des chartes de Lorraine, layette Nancy 1, n°4. Charte en original sur parchemin (les deux sceaux pendants n'existent plus)

 

Jeu Perrins de Louvenci, escuiers, fais savoir à tous que je suis devenu hons liges [homme lige] devant tous hommes à mon chier seignour Ferri duc de Lorraingne et marchis, et en teing et doi tenir en fie [fief] et en hommaige, de lui et de ses hoirs [héritiers], cinquante resauz de blef, moitie wain et moitie avoinne, que il m'ait assignei chascun an ez araiges de Donjelien et de Gelloviller, et quatre cherres [charrues] de foinc que il m'ait assignei chascun an en son prei desouz Monfort entour l'estanc ; et pour lou fie desus dit, je et mi hoir qui celui fie tenrons, devons wardeir [garder] on chastel de Monfort an et jour chascun an, à touz jours mais, et y devons demoreir, je et mi hoir que lou devant dit fie tanront, tant comme messires li dus devant dis ou sui hoir de cui on tanroit celui fie vouroient, sans partir de lei.

 

En tesmoingnaige de ceste chose, pour ceu que je n'ai point de saiel [sceau], sont ces lettres saieles [scellées] à ma proiere et à ma requeste dou saiel honorable peire en Deu signour Conrat par la graice de Deu eveske de Toul, et dou saiel de la court l'officiaul de Toul.

 

Ce fut fait l'an de graice mil douz. cens. et quatre vins, lou lundi après feste saint Gregoire, on mois de mars.

 

Février 1291. Echange touchant Rosières, Portieux, Domjulien, Girovillers, Montfort, Ségènes, Remoncourt et Vittel

Original : Trésor des chartes de Lorraine, Cartulaire, B 380, folio vij et suivants

 

Nous Ferry, duc de Lorraine et marchis, faisons savoir à tous, que comme Jehan de Rouzieres, chevalier, filz Joffrois de Rouzieres qui fut, ait éschangé et delivré à nous, tout ce qu'il avoit, povoit et devoit en la ville de Rouzieres, en ban, en justice, en hommes, en femmes et forteresse, en salines, en terres, en preiz, en bois, en eauves, en rentes, en censes, en seigneuries, en vignes, en fours, et en toutes choses quelz quelles soient, sens rien en retenir, et nommement la grainge de Portesuel et quant qui appartient, et douze livres deix solz de toullois que ledit Jehan avoit chascun an, sur la partie les enfans le seigneur Brun de Rouziere, en partie de la saline de Rouziere.

 

Et comme ledit Jean a faict cest eschange à nous, par lou loz et par l'octroy Liebault sieur de Beffroymont [Bauffremont] chevalier, et de ma dame Adeline sa femme, mère audit Jean, laquelle Adeline ledit Jehan a promis et est tenu de rendre taisant à ce qu'elle ne demandera jamais riens à nous, ne [ni] à nos hoirs des choses dessusdites, pour la raison de son douaire, ne pour autres raisons, pour cause quelz quelles soient.

 

Assavoir est que nous, en recompensation et en eschange des choses dessus dites, avons donné et contreschangé, donnons et eschangeons, audit Jehan et à ses successeurs, à tenir et avoir en heritaige à toujoursmais, tout ce que nous aviens, pouviens et debviens avoir à Dompjulien dessoubs Monfort et à Giroviller, en ban et barochaiges, en finaiges [finages = terres limitrophes] et aux appartenances des ditz lieux. C'est assavoir, en hommes, en femmes, en bois, en eauves, en preiz, en terres, en rentes, en censes, en droictures, en fours, en molins, en estangs, en bans, en justice, en signeuries, en wardes [gardes], et en toutes autres choses quelz quelles soient sens rien en retenir, et nommement entierement que li hoirs monsr Waultier d'Ascer qui fust [feu], tiennent ez fours desdites villes de Dompjulien et de Giroviller.

 

Lesquelles choses nous devons delivrer et faire delivrer audit Jehan, et warantir à toujoursmais, en telle meniere que ledit Jehan et ses hoirs en joyent desormais paisiblement, sans nulles chalenge [contestations], desdits hoirs monsieur Waultier d'Ascer. Et est assavoir que es wardes des clercs, des prebtres et des gens de religion, que sont et seront ausdits lieux, et aux appartenances desdits lieux que nous avons eschangé audit Jehan ou les siens, ou leur commandement, meffaisoient riens en aucuns cas qui appartient à amander par court et par justice laye, aux prebtres, curés et vicaires des lieux, et ledit Jehan ou ses hoirs ne leurs en vouloient assez faire, ilz en pourraient venir à nous par voye de ressort comme à souverain, et nous ly trop ferions deffaire s'il y estoit. Et à dès demeure entierement audit Jehan et à ses hoirs, les wardes desdits curés et desdits vicaires.

 

Et encor c'est assavoir que nous retenons, Wiry de Dompjulien pour demeurer dessoubz nous toute sa vie, en quelque lieu qu'il luy plairoit, fors des bans de Dompjulien et de Giroviller, et doit ledit Wiry oster maintenant ung de ses hoirs de sa mainbournie [sous sa tutelle], lequel hoir seroit bourgeois de la ville de Dompjuillien, et se doit devestir [désaisir] ledit Wiry de l'heritaige qu'il tient ez bans et barrochaige, et aux appartenances de Dompjuillien et de Giroviller, et en doit envestir [investir] ledit hoirs qui bourgeois sera de Dompjullien, prendre et avoir en sa mainbournie et tenir l'heritaige dudit hoir pour raison de mainbournie, tant comme je viverai, et lui plaira, en quelque lileu qu'il demeurera dessoubz nous, en tel meniere que ledit Wiry paiera audit Jehan et à ses hoirs, tel rentes et tel debite comme li dessusdit heritaige doit, ne ne pourra ledit Wiry vendre ne engager, aliener, detraire ny eschanger poinct de l'heritaige dessusdit, si ce n'estoit par le gres ledit Jehan ou de ses hoirs.

 

Et s'il advenoit que ledit Wiry n'eust nulz de ses enffans fuers de sa mainbournie, ou fussent des gres fuers de sa mainbournie, cil qui en seroit feut, ou sont jay fuer, serviroit audis Jehan et à ses hoirs, aux lieux dessus dits de Dompjuillien et de Giroviller, ainsi comme li bourgeois desdictes villes, s'il advenoit qu'ils tenissent poinct de l'herigaige dudit Wiry de ceuz bans et de ceuz lieux.

 

Et s'il advenoit que la femme dudit Wiry morust avant ledit Wiry, les heritaiges et li teneurs que ledit Wiry tient de par sa femme, ez bans et ez lieux dessus dits, revanront quictement aux hoirs de ladicte femme, qui serviroient audit Jehan et à ses hoirs, aux lieux dessusdits.

 

Encor est assavoir que li hommes et les femmes et ly bourgeoises de Dompjullien et de Giroviller que sont et qui seront, ont usuaires et auront de pasturaiges sur ceulx de Montfort, de Segennes (1) et de Remoncourt, et ez bans et finaiges, parmy le dommaige rendant, se poinct il en y avoit, sans pargies paier, et cil de Montfort et de Segennes et de Remoncourt, autre tel usuaires et de pasturaige, sur ceulx de Domjullien et de Giroviller, et en lours bans et en leurs finaiges.

 

Encore est assavoir que nous avons donné et eschangé avec les choses dessus dites, audit Jehan et à ses hoirs, tout ce entierement que les deux frères de Dampierre, c'est assavoir messire Richart et messire Hugues, chevaliers, avoient, avoir pouvoient et debvoient en la ville de Vitel [Vittel], en ban, en barrochaige, ez finage et appartenances de Vitel, soit pour raison de fied [fief] ou d'arrier fied de la duché, ou des fiedz ou des arrieres fiedz de Darney, ou pour autres raisons ou causes quel qu'elle soit, c'est assavoir en hommes, en femmes, en terres, en preiz, en bois, en eauves, en fours, en molins, en rentes, en censes, en bans, en justice, en toutes signeuries, en wardes de clercs, de prebtres, de gens de religion, et especialment en la warge de la maison de l'ospital de Remyremint [Remiremont] et des appounendes en cel hospital qui est en ladicte ville de Vitel, et en toutes autres wardes et autres choses, quelz qu'elles soient sans riens à retenir, et tout ce entierement que avoir pouviens et debviens, sans riens à retenir, fors tant que se ledit Jehan, ou ses hoirs ou leurs commandement, meffaisoient riens en aucuns cas qu'il appartient à amender, par court et par justice laye, aux prebtres, curés et vicaires des lieux, à l'ospital ou à sa provendes en l'ospital de Vitel, et ledit Jehan ou ses hoirs ne leurs en voulroient assez faire, ilz en pourroirnt  venir à nous par voye de ressort comme à souverain, et nous luy trop ferions deffaire se il y estoit. Et à dès demeurent entièrement les warges desdits curés et vicaires et de l'hospital et des provendes en l'hospital, audit Jehan et à ses hoirs.

 

Et toutes ses choses dessus dites tient et doit tenir ledit Jehan liegement devant tous hommes, de nous et de nos hoirs, et en sont et doivent estre nostre homme lige devant tous hommes, ledit Jehan et ses hoirs après luy, qui les choses devant dites tanroient.

 

Et renonçons pour nous et pour noz hoirs que nous ne nostre hoirs, n'aurons riens ne ne debvons avoir aux lieux dessusdits, de ce jour en avant, ne par voye d'estortion, ne de tolle, ne de crevée, ne d'autres injures, ne demendes ne grevances, ne hostz, ne chevachées, ne charrois, ne ne retenons riens pour nous ne pour noz hoirs en ladicte ville de Vitel, ne ez appartenances.

 

Et toutes ces choses dessusdites et unes chascunes par soy promettons nous et nous sommes tenus, pour nous et pour noz hoirs, à tenir fermement, sans aller encontre par nous ne par aultruy, audit Jehan et à ses hoirs, et des choses contenues en l'eschange dessusdit, que touchent en aucune partie la saisine ou le droit d'aultruy, somme nous tenus à delivrer en telle meniere que ledit Jehan et ses hoirs en puissent joyr paisiblement à tousjours desorenavant, sans nulz empeschement d'aultruy.

 

Et toutes ces choses dessusdites et une chacune par soy, promectons et somme tenus, pour nous et pour nos hoirs, sur l'obligement de tous nos biens meubles et non meubles, où qu'ilz soient, à garentir ledit Jehan et à ses hoirs vers toutes gens, à tousjours jusques à droit.

 

Et s'il advenoit que nous ou nostre hoir, ou allient encontre laquelle chose, jai Dieu ne wieulle, nous voulons et ottroions que ledit Jehan et ses hoirs, tiennent en alleuf et comme leur franc alleuf les choses dessus dites, et les reprengnent et puissent reprendre de quelque seigneur que mieulx leur plairoit, par nostre los et par nostre grey, pourroit deffendre et warder de force ledit Jehan et ses hoirs, encontre nous et encontre noz hoirs, et contre toutes autres gens que empeschement mectroient ou vouldroit mectre en tout ou en partie, aux lieux et aux choses dessusdites.

 

Et ne pouons ne ne debvons, nous ne nostre hoir, retenir desorenavant aux lieux de nostre terre que nous ayens, ou que nous ou nostre hoirs acquiestiens, ou par compaignie ou en autre meniere ayens ne avoir puissienz, nulz des hommes, ne des femmes, ne des bourgois ne des bourgeoises qui sont et seront ledit Jehan ne ses hoirs, des lieux des eschanges dessus dit, ne ledit Jehan ne ses hoirs ez bans et ez lieux dessusdits de Dompjuillien et de Giroviller, nulz de nous que nous ne puissiens avoir nous ne nostre hoirs, et en cest fact avons nous renuncé et renunçons, pour nous et pour nos hoirs, à l'exception de fraude, deception, à benefice de restitution, à tous droits et à tous us, à toutes coustumes, et à toutes autres choses qui en cest faict nous pourroient aider, et audit Jehan et à ses hoirs grever et nuire.

 

En tesmoing de tous ces choses, et pour ce qu'elles soient fermes et estaubles, nous en avons donné ces presentes lettres seellées de nostre seel.

 

Que furent faictes l'an de grace mil deux cens quatre vingtz et unzes ans, le sabmedy prochien après la Chandeleur, on mois de febvrier.

 

(1) Segennes ou Sugène, village détruit, situé entre Remoncourt et la Neuveville sous Montfort.