Rémilly sur Lozon
(05 / 12 / 2008)
1. Localisation (Basse Normandie, 50
- Manche)
A Rémilly sur Lozon (D 8 et D
94), à une vingtaine de km au Nord Ouest de St Lô, se trouve un château de
Montfort.
Extrait d’une carte de Cassini de
Thury (1714-1784), limitée aux environs de Rémilly : la carte contient les
toponymes Monfort., au Nord Ouest de Rémilly, ainsi que la Grandrie, Ligny,
la Halle.
2. Description
2.1. Le château
« Ruines de l'ancien château
fort de Montfort (IMH), de style Louis XII : restes de courtines, logis flanqué
de poivrières d'angle, ruines d'une tour, fenêtres à meneaux » (La Torre).
Selon une notice du
ministère de la Culture, le château de Montfort (correspondant à l'ensemble des
ruines actuelles) date de la seconde moitié du XVème (période de
reconstruction importante en Normandie) et de la seconde moitié XVIème
(propriété privée, inscrite aux MH par arrêté du 29 décembre 1978).
Le château a été en grande
partie détruit (1875) (Fierville). La partie subsistante comporte un élégant
porche d'entrée, un logis seigneurial ainsi que des communs d'aspect plus
modeste.
2.1.1. Le logis possède un
escalier à vis, des fenêtres carrées à meneaux et chassis de fer, deux
cheminées ouvragées aux premier et deuxième étages (à l'Ouest), de nombreuses
meurtrières habilement disposées ainsi que deux tourelles, dont une en
encorbellement, au Nord Ouest et au Sud Ouest. La base de l'une d'elles est
finement sculptée, l'autre est en forme d'échauguette.
Une tour située au Nord Est
contient un escalier à spirale (limaçon) en pierre de taille, comportant encore
une soixantaine de degrés ; sa porte supportait des armoiries aujourd'hui
martelées, peut-être celles des Marquetel. A son sommet, une petite chambre carrée,
munie d'une cheminée, pouvait servir de poste d'observation (vue lointaine sur
les marais de Tribehou et d'Auxais).
2.1.2. Vers l'Est, ne
subsistent que les substructions de l'ancienne chapelle castrale. A l'Ouest,
près d'un mur d'enceinte extérieur, se trouve le colombier. L'enceinte formait
un quadrilatère dont subsistent les faces Ouest et Sud. L'entrée principale, au
Sud, devait supporter un pont-levis, car les trous des chaînes de relevée en
sont encore visibles. Une autre porte, plus petite et munie d'une herse, est
située à sa gauche. Ces deux portes sont en parfait état de conservation.
2.1.3. Vers 1840, le
château, inhabité depuis longtemps, nécessitait d'importantes réparations. Claude
François Joseph Lempereur, habitant de St Pierre, préfèra en abattre certains
bâtiments afin de reconstruire, à l'angle du mur d'enceinte et près du portail,
une habitation (aujourd'hui en ruines). Les parties détruites furent d'abord la
chapelle, puis la moitié du bâtiment central, ensuite la ferme (au Nord), enfin
les écuries (à l'Est).
Les ruines du château de
Montfort ont fait l’objet de restauration à partir de 1990.
Aspect général de l'entrée (le logis est visible au
fond du porche).
Arrière de l'entrée (communs à gauche) et du
logis (en venant du porche d'entrée), vue depuis le logis.
Le logis (état dans les années
1980), vues arrière et intérieure et tour à encorbellement (détails).
Tour ruinée (à proximité).
2.1.4. A Rémilly, la
« halle au Gascoing » (du nom d'une famille Le Gascoing, existant à
Rémilly au XVIème) contenait encore en 1972 des pavés (XVIème
?) provenant du château de Montfort et conservés par M. Gosselin. Cette halle
était le siège d'une part de sergenterie détenue en parage (aveu du 12
septembre 1416).
2.2. Autres sites
2.2.1. L'église a subi de
nombreuses transformations. Des traces d'opus spicatum furent découvertes en
1863 vers la côtière Nord de la nef. Cette dernière a été réparée ou même
refaite en 1660, 1751, 1869 et 1934. Le transept du XVème est
surmonté d'un clocher à bâtière, et contient un bas-relief de 1555 représentant
Ste Agathe. La chapelle Nord, dans laquelle étaient inhumés les Marquetel,
contient une représentation de pieta et de St Roch (XVIème) ; des
anges porte-blason servent de culots. Le choeur contient une vierge à l'enfant
du XVème.
2.2.2. Le presbytère,
reconstruit en 1690 aux frais du curé Pierre Guéroult, connaît quelques
aménagements en 1786 (ouverture d'une croisée du côté Nord de la salle), sert
d'école pendant la Révolution, est rendu à la cure en 1796, voit sa toiture
modifiée (la paille est remplacée par de l'ardoise, sauf au Sud). D'aspect
massif, il se termine par deux gros pavillons et donne sur un jardin à travers
un élégant porche à deux portes (de style XVIème).
2.2.3. La Granderie
(peut-être d’après le nom d'une famille Legrand), demeure du XVIIIème,
avec des dépendances plus anciennes (tours d'angle dans la cour, douves) ;
2.2.4. La butte St Clair,
actuellement sur Le Mesnil - Vigot, sur laquelle se trouvent les ruines de
l'ancien château féodal de Rémilly (édifice quadrangulaire, doté de tours
d'angle circulaires, une courtine étant munie d'une tour de flanquement (?)
rectangulaire), ayant appartenu aux premiers seigneurs connus de Rémilly, les
seigneur du Hommet (traces au XIème).
2.2.5. La chapelle St Clair,
chapelle castrale détruite à la Révolution.
3. Histoire
La seigneurie de Montfort a appartenu
à la famille Le Marquetel (noblesse de robe), qui construisit le château à la
fin du XVème et le posséda
jusqu'en 1739. Elle possédait aussi des biens à St Evremont (actuelle St
Ebremont de Bonfossé), à Hubertant et la baronnie de St Denis Le Gast.
Au plan économique, Rémilly
sur Lozon a développé la vannerie (artisanale puis industrielle), favorisée par
la culture de l'osier, dans les marais traversés par le Lozon : paniers à
tomates pour les iles anglo-normandes (usine industrielle fondée en 1864 par M.
Dubosq), paniers à beurre, hottes, pannetons de boulangerie, puis ameublement
en osier et rotin (meubles de jardin, canapés, etc).
4. Héraldique et généalogie
a. Noël Le Marquetel (xxxx -
xxxx), écuyer, premier possesseur de Montfort.
b. Jehan Le Marquetel (xxxx
- xxxx), prêtre et curé de Rémilly, second possesseur de Montfort.
c. Gilles Le Marquetel (xxxx
- 1569), écuyer, cité en 1532 dans un aveu au roi de Louis V de Rohan. De son
mariage avec Magdeleine Martel, soeur de Etienne Martel, évêque de Coutances,
Gilles eut trois fils
ca. Jean (xxxx - xxxx),
l'aîné, qui prit le nom et les armes de St Denis. Jean Le Marquetel, seigneur
de St Denis, épousa Catherine Martel, de la branche de Fontaine Martel. Son
fils, Charles Le Marquetel de St Denis, épousa Charlotte de Rouville : il en
eut une fille et six fils. Le troisième, Charles, fut un écrivain connu sous le
nom de St Evremont
(parfois écrit St Evremond).
cb. Gilles (xxxx - xxxx), le
deuxième, seigneur de Trelly, qui eut la seigneurie de Hubertant dont il prit
le nom.
cc. Jacques (xxxx - xxxx),
le troisième, qui reçut en partage les terre et seigneurie de Montfort, et en
prit le nom. Quant à la branche des Marquetel de Montfort, ce Jacques Le
Marquetel est cité comme seigneur de Montfort dans un contrat passé (13 février
1597) devant Louis et Pierre Lepourry, tabellions au siège de Rémilly. De son
mariage, il eut :
cca. Henri Marie (xxxx -
xxxx), qui épousa Charlotte d'Orange des Rochers. Il en reçut en dot la
seigneurie de St Aubin de Losque : Henri Marie prit ce titre, avec ceux de
Montfort et de Mons. Il fonda à Rémilly la confrérie du Rosaire, qui n'existe
plus (une inscription subsistant sur le pilier Nord de la tour de l'église y
fait référence). Selon un acte du 27 octobre 1658, il fut inhumé dans l'église.
D’où deux enfants :
ccaa. Magdeleine Le
Marquetel (xxxx - xxxx), qui épousa Pierre Soyer, seigneur d'Intraville (Seine
Maritime) et conseiller au Parlement.
ccab. Charles Le Marquetel
(xxxx - xxxx), écuyer, seigneur de St Aubin de Losque, Montfort, Mons,
Feugueroles, Bully, etc, qui épousa Gabrielle de Troismonts vers 1670. Certains
biens dotaux de son épouse sont remplacés par contrat (1697). Ces deux époux
décédèrent en 1709. Charles laissa sept enfants :
ccaba. l'aîné, Henri (xxxx -
xxxx), qui fut seigneur de Montfort.
ccabb. Françoise Barbe (xxxx
- xxxx), qui épousa en premières noces noble Louis Joseph du Chastel, seigneur
de Rampan, et en secondes noces Hyacinthe d'Anneville, d'Auxais.
ccabc. Ursule Jourdaine
(xxxx -xxxx), mariée (25 juin 1697) à Pierre de Godefroy, seigneur de Vermont
et de Brévands.
ccabd. Laurent Félix (1674 -
1751), héritier du titre et des biens de Montfort (après un long litige avec
son frère aîné Henri), qui épousa Geneviève de Chaumontel. D’où une fille :
ccabda. Marie Magdeleine
Anne (1716 - xxxx), seule héritière. Elle porta cet héritage aux Lempereur de
St Pierre, en épousant (13 janvier 1739) Pierre Gabriel Jacques Lempereur,
chevalier, seigneur de St Pierre Langers, La Beslière, La Rochelle, Coigny etc,
écuyer ordinaire du roi, fils de feu messire Jacques Lempereur et de noble dame
Marie Paquet. D’où :
ccabdaa. Hervé Louis Gabriel
(xxxx - xxxx) eut Rémilly. Au moment de la Révolution, de nombreuses pièces
d'archives familiales lui furent enlevées et disparurent. N'ayant pas émigré,
après sa mort en 1816, ses biens revinrent à ses deux frères consanguins.
ccabdab. Gabriel (xxxx -
xxxx).
ccabdac. Claude François
Joseph (xxxx - xxxx). Ce dernier reçut Montfort et Le Pestel et fut bienfaiteur
de Rémilly. Il mourut (1859) en laissant trois enfants :
ccabdaca. Elisabeth (xxxx -
xxxx).
ccabdacb. Louis (xxxx -
xxxx), député en 1875.
ccabdacc. Augustin Louis
(xxxx - xxxx), ancien préfet de Corrèze.
En 1875, Elisabeth et Louis
possédaient Montfort. En 1899, Montfort appartenait aux Vermont, puis à Maître
Lemazurier, notaire à La Chapelle en Juger, père de Mme Cléraux, de Caen. Ils
le possédaient encore en 1972.
L'armorial de Normandie
(Magny) indique :
MARQUETEL (LE). – Ecuyer,
sieur de St Denis le Gast, de St Evremont, de Grimesnil, de la Lenville, de
Tany, etc. Election de Coutances, maintenu en 1666.
armes des Marquetel de St Evremont : « d’or à
une quintefeuille de gueules » (cf celles de Leicester : « de
gueules à une quintefeuille d’argent »).
Il indique aussi
l’existence de 2 familles du nom de Montfort en Normandie :
1. Dans l’élection
d’Arques, avec les armes : « d’argent à 3 molettes d’éperon de
gueules, à un lionceau d’azur en coeur ».
2. Dans l’élection de
Falaise, maintenu le 11 juillet 1667 et portant : « d’argent à trois
trèfles de gueules ». C’est dans le ressort de l’ancienne élection
d’Argentan et Falaise que l’on trouve aussi St Evroult de Montfort. La
construction de ces armes est aussi de même mode qu’à Montigny-Montfort
(21 - Côte d’Or).
9. Bibliographie
Archives départementales de
la Manche :
1. Fonds détruit : H 48 et H53-55 (période 1195-1342)
(cf Simon) ;
2. Fonds subsistant : archives notariales (très riches)
: 1568, 1595 à 1635 et 1652 à 1688 (répertoires). Après 1686, les actes
notariés relèvent de Marigny (archives déposées au Archives départementales).
Archives municipales (état
civil) : 1673-1674, 1679 à 1685 et depuis 1689.
Archives paroissiales et
diocésaines : aux Archives départementales du Calvados (série C, XVIIIème)
Bernard Auguste (abbé -,
alors vicaire à Rémilly), « Notes sur Rémilly et ses seigneurs (des
origines jusqu'en 1867) » (manuscrit au presbytère, microfilm aux Archives
départementales)
Bernard Auguste (abbé -),
« Monographie des communes du canton de Marigny » (pages 191-196),
(copie dactylographiée au Archives départementales)
Fierville Ch., « Le
marquisat de Marigny » (pages 112-124), in Mémoires de la Société
académique du Cotentin, tome Ier, 1875, Coutances (utilise le
manuscrit de l'abbé Bernard)
Guillot G., « Ruines du
château de Montfort », in Normandie monumentale et pittoresque, Manche,
tome Ier, 1899
Lepingard Ed., « La
baronnie du Hommet, son origine, ses seigneurs » (sans date)
Magny Edouard de - (sous la direction de -), « Nobiliaire de Normandie », Tome 1 (1863)
(IV-198-340 pages), Tome 2 (ca 1864) (P. 341-687-280 pages), Paris
(Rouen : Lebrument ; Caen : A. Massif)
Société d'Archéologie de la
Manche, « Mélanges », Première série
(1972)
Torre Michel de la -, « Villes et villages de France (50 - Manche)
», Editions Deslogis-Lacoste, 1990