Monfort
(21 / 01 / 2018)
1. Localisation (Midi Pyrénées, 32-Gers)
Monfort (32120) est une commune située
à
Perspective sommaire du village et plan de situation de la bastide (d’après Morisse).
2. Description
2.1. Le village est situé en hauteur et couronne une colline d'apparence naturelle. Il ne comporte aucune trace de château, mais possède des vestiges de remparts (mur d'enceinte) et des maisons anciennes (XIVème).
Il avait 3 portes : la porte du Fossa, la porte Ste Gemme et la porte du Dessus. Cependant, une gravure censée représenter cette dernière (Morisse) concerne, en fait, la porte de Borda à Montfort en Chalosse (40-Landes).
Les flancs de la colline comportent une sorte de plateforme périphérique qui a pu avoir joué le rôle de fosse ou de lice. La colline peut donc avoir été constituée, en partie, d'une motte artificielle. Cette plateforme gazonnée, qui fait ainsi le tour du village, laisse parfois entrevoir des contreforts.
* cartes postales anciennes : vues touristiques, panorama du village, grand’rue ;
* remblai avec traces de remparts (photographie des années 1980) ;
* contreforts et allée couronnant le colline (photographie des années 1980).
2.2. Le village possède une église (MH) (XIIIème-XIVème), avec un clocher-tour octogonal, une nef unique, un choeur polygonal, et des chapelles logées entre les contreforts. Le cimetière comporte aussi une chapelle.
* cartes postales anciennes : église et rue de l'abreuvoir, église et poème de Salluste du Bartas, clocher du XIVème ;
* église (photographie des années 1980).
2.3. La place centrale (site inscrit) est bordée de maisons à galeries, et possède une vieille halle et une fontaine. Les rues du village sont disposées en équerres, structures caractéristiques des bastides du Moyen Age.
2.4. La chapelle St Blaise, récemment restaurée, située à
3. Histoire
3.1. La bastide de Monfort fut créée (1275) par Géraud V, comte d'Armagnac, qui lui accorda une charte de coutumes et de franchises. Son fils, Gaston d’Armagnac, vicomte de Fezensaguet (Fezensaguelli) et de Bruilhois (Brulhesii), accorda (1309) une autre charte : chartes initiale et ultérieure.
Ces chartes sont rédigées en latin
(Bladé, avec revue critique
in Bibliothèque de l’Ecole des Chartes). Ces coutumes proviennent du « Cartulaire
de Monfort » écrit dans la seconde moitié du XIVème. La
bastide qu’elles régissaient fut élevée par Géraud, comte d’Armagnac, pour
assurer entre Mauvezin et Lectoure des rapports souvent interrompus par des
brigands établis alors sur les frontières de
On peut ainsi relever, dans le coutumier, la phrase « plaga mortifera aut alio crimine quo corpus suum vel bona sua nobis debeant esse incursa ut nisi pro forefactis in nobis vel gentibus nostris commissis ». De même, « De habitatore ... libertatem : Item quicumque in dicta villa venire voluerit seu habitare et mansionem facere sit liber sicut alii habitatores si sine prejudicio alterius fieri possit ». Il mentionne aussi les consuls et leurs pouvoirs, ainsi qu’un baïle (bajulus = bailli). La première coutume est attestée (signée) par Pierre de (la) Guarde, notaire à Mauvezin (Malivicini).
Parmi les signataires, on peut relever :
* pour la première charte : Olivier, moine de l’abbaye de Gimont, Eudes de Preissac ? (Hodo de Preyssano), Arnaud de Gère ? (Geera), Pierre de Sobola, chevalier ;
* pour la seconde charte : Pierre Raymond de Labatut, Bernard Gac ? (Gasc), Géraud de Moissac (Moyssaco), Bernard de Laval (Laual). On relève aussi les noms de Géraud de Lespinasse (Geraldi de Laspinassa), Laurentin des Chapelles (Laurentinus de Capellis).
Plus tard, son fils, Simon V de
Montfort, comte de Leicester, se vit confier la charge du gouvernement de
Ville consulaire au Moyen Age, Monfort
fut, à
« Salluste me montra de loin un grand clocher
Qui sembloit, orgueilleux, avec sa pointe aigüe,
Vouloir outre percer l'epesseur de la nue. »
« Voilà le lieu, dit-il, de ma nativité.
Voilà Monfort qui m'a, dans ses bras allaité ;
Monfort qui nous témoigne, avec sa petitesse,
Que c'estoit en son temps quelque grand forteresse. »
Au XVIème, les guerres de religion ont affecté l’histoire du village (Pont, 1898).
3.2. Sur le territoire de la commune, non loin du chef-lieu, se trouve le château d'Esclignac (IMH au 19 / 09 / 1958, XVème-XVIème) (propriété privée), restauré (plan par Séraphin). Le premier château fut construit (circa 1030) par Guillaume Loup, seigneur de Preissac, dans la plaine située au pied de Monfort, à l'emplacement d'une ancienne villa gallo-romaine. Un de ses descendants, Amavin de Preissac, suivit Louis IX à la septième croisade (1248). Il en revint avec un titre de noblesse et pour armes : « d'argent au lion de gueules » (Cournet). On peut noter une certaine similitude avec celles de Montfort l'Amaury : couleurs inversées, figure (brisure ?).
Le château fut ensuite (1295) habité
par Vital de Montgaillard, puis, au siècle suivant, à nouveau par des Preissac.
Vital de Preissac conclut (1319) un accord avec les consuls de Monfort pour
assurer son entretien et sa défense. Il était encore vivant en 1393. Un comte
de Preissac devint (1780) lieutenant général du royaume. Son fils fut fait
(1787) duc d'Esclignac. Cette branche éteinte fut relayée par la branche
parente des comtes de
Esclignac était précédemment une paroisse. Celle-ci fut ensuite (1824) rattachée à Monfort.
3.3. L'histoire locale (Lamazouade) raconte deux procès en sorcellerie (30 novembre 1672) liés à des malaises ressentis par des habitants de Monfort. La véritable cause de ces malaises n'avait rien à voir avec la sorcellerie : ceux-ci étaient, en réalité, dûs à une intoxication, la « maladie du hoquet » (ou ergotisme), provenant d'une maladie cryptogamique du seigle, et qui entraîne des troubles neuro-psychologiques.
4. Héraldique et toponymie
4.1. Nom antérieur : Monfort du Gers (selon divers documents : cartes postales anciennes, etc).
Les armes de la ville, définies dès sa fondation (fin du XIIIème), peuvent se lire : « de gueules au mont (ou rocher) d'or issant de la pointe, surmonté d'un créquier du même, accompagné de 2 globes (ou lunes) d'argent, chacun chargé d'une croix d'azur ».
Ces armes ont été retrouvées (fin XIXème)
par un peintre monfortois, Louis Clergue, chargé de repeindre la voûte de
l'église : elles étaient recouvertes d’un enduit léger datant sans doute
de
La devise de la ville est « flouresci per tout » (je fleuris partout). Le créquier, en effet, est une plante robuste qui pousse sur des terres arides.
4.2. On peut remarquer la grande ressemblance des armes de Monfort avec celles de Montfort en Chalosse (40-Landes), où les « besans » sont peut-être des lunes surmontées d'une croix : « d'or au créquier de sinople posé sur un mont issant de la pointe du même, accosté de deux lunes d'argent surmontées chacune d'une croix du même ». Une relation historique entre ces deux villes n'est pas à exclure, les bastides ayant été notamment fondées à l'époque du Prince Noir. Monfort fut en effet créée en même temps que ses établissements religieux. Des confusions entre ces deux villes ont d’ailleurs pu avoir été faites par les historiens locaux.
4.3. Les armes de la maison d'Armagnac sont souvent données comme celle des Preissac : « d'argent au lion de gueules ».
8. Toponymie
Dans les coutumes de Monfort (Bladé), Monfort est écrit « Montis fortis » ou encore « (apud) Montem fortem », ce qui ne laisse aucun doute sur sa fonction défensive, donc sur l’existence de fortifications passées. La rivière voisine est nommée « fluvius Orba »
Il existe une commune du nom de Preyssac d’Excideuil (24160). On trouve aussi Périssac (33240) en Gironde, et Prissac (36370) dans l'Indre.
La ville de Hitte (65190) se trouve dans les Hautes Pyrénées, et 2 Lahitte dans le Gers (32810) et les Hautes Pyrénées (65130) ; Lahitte-Toupière (65700) est aussi dans ce dernier département.
9. Bibliographie
Balguerie Pierre (1768-1830), « Statistique du Gers »
Bémont Charles, « Simon de Montfort, comte de Leicester, sa vie, son rôle politique en France et en Angleterre », Paris, 1884 (reprint par Megariotis en 1976).
Bladé Jean François (1827-1900), « Coutumes municipales du département du Gers », Première série, Auguste Durand, Paris, 1864
Notamment coutumes de Monfort (pages
110-114) et nouvelles coutumes de Monfort (pages 115-122) (Monfort,
vicomté de Fezensaguet)
St Blanquat Odon de -, « Comment se sont créées les bastides du Sud Ouest »
Breuils A. (abbé -),
« L'Armagnac », Bulletin de
Breuils A. (abbé -), « Les barons du
Fezensac à l'époque féodale », Bulletin de
Breuils A. (abbé -), « Les principaux barons du Fezensac à l'époque féodale », in Revue de Gascogne, volume 37 (pages 77 et 145), Auch, 1896
Breuils A. (abbé -), « Jean Ier, comte d'Armagnac, et le mouvement national dans le Midi au temps du Prince Noir », in Revue des questions historiques, tome LIX (pages 44 à 102), Paris, 1896
Breuils A. (abbé -), « Eglises et paroisses d'Armagnac d'après une enquête de 1546 », in Revue de Gascogne, nouvelle série, volume 4, Auch, 1904
Clergeac A., « Cartulaire de l'abbaye
de Gimont (1142-1233) », in Société historique de Gascogne, H. Champion, Paris,
L. Cocharaux, Auch, 1905
Clergeac
Adrien (1870-19xx), « Chronologie des archevêques, évêques et abbés de
l’ancienne province ecclésiastique d'Auch et des diocèses de Comdom et de
Lombez (1300-1801) », Honoré Champion (Paris), Léonce Cocharaux (Auch), 1912
Cournet Louis, « D'argent à lion de gueules. Récit historique de la vieille Gascogne », Léonce Cocharaux, Auch, 1946
Curie-Seimbres Alcide, « Essai sur
les villes fondées dans le sud-ouest de
Douais Célestin, « Les Frères Prêcheurs en Gascogne aux XIII-XIVèmes siècles. Chapitres, couvents et notices. Première partie : chapitres », Honoré Champion (Paris), Cocharaux Frères (Auch), 1885
Dralet
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Durrieu Paul, « Documents relatifs à la chute de la maison d'Armagnac-Fezensaguet », Honoré Champion, Paris, Cocharaux Frères, Auch, 1883
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Laplagne-Barris P., « Sceaux gascons du
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Montfort
(passim), Preissac (pages 456 et suivantes)
Laurent Gustave, « L'Armagnac et les pays du Gers »
Mazéret Ludovic, « Essai
généalogique sur la famille de Broqueville (branche de Monfort) » (extrait
du Bulletin de
Arme
des Broqueville : « d’azur au bouton d’or, cantonné en chef d’une
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Mazéret Ludovic, « Les guerres
fratricides à Monfort », Bulletin de
Morisse Jean (Dr -), « Histoire de Monfort en Fezensaguet, Bastide d'Armagnac » (août 1962), Imprimeries de Gascogne, Condom. Ouvrage réédité par sa fille, Mme Messerli, en 1995
Noulens J. (1828-18xx?), « Documents
historiques sur la maison de Galard » (4 tomes en 5 volumes), Imprimerie de
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Quercy, noblesse : pages 11 (Dupont
de Ligonnès, seigneur de Pomeyrol, dans Caylus), 12 (Arnaud François de Puniet
Montfort)
Samaran Charles, « La maison
d'Armagnac au XVème siècle et les dernières luttes de la féodalité
dans le Midi de
Charles Samaran (1879-1982), archiviste aux Archives Nationnales, ancien élève de l’Ecole des Chartes et de l’Ecole française de Rome, devint directeur des Archives de France et membre de l'Institut
Samaran Charles, « Le plus ancien
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Séraphin Gilles, « En Gascogne,
une belle demeure seigneuriale : Esclignac », in Vieilles maisons
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Société de l’Ecole des Chartes, « Bibliothèque de l’Ecole des Chartes », A.L. Hérold et F. Amyot, Paris, 1865
Critique sévère de J.F. Bladé par P.M. (Paul Meyer ?) (pages 81-82)
Torre Michel de la -, « Le Guide des châteaux de france, Gers », Hermé, 1985 (première édition : Berger-Levrault, 1981)
Torre Michel de la -, « Villes et villages de France (32 - Gers) », Les Editions Deslogis-Lacoste, 1990
Tour Denis François Gastelier de la -
(1709-1781), « Généalogie de la maison de Preissac »
Tudèle Guillaume de -, « La
chanson de la croisade albigeoise » (plusieurs éditions en français, dont
Fauriel en 1837). Editée et traduite par Eugène Martin-Chabot en 1931-1954.
Rééditée par
Ce « Guilhem de Tudela » était un clerc espagnol originaire de la ville de Tudèle (Espagne, Navarre, province de Pampelune, sur l’Ebre) dont la chanson relate les évènements de 1207 à 1213
Sites Internet
http://www.societes-savantes-toulouse.asso.fr/samf/memoires/T_59/bull993.htm
http://broqueville.be/blog/?p=63 (famille de Broqueville)